ENTRE ÉLEVAGE ET BIODIVERSITÉ

Nombre des milieux pâturés de façon extensive, longtemps considérés comme improductifs, font aujourd’hui l’attention des environnementalistes, des écologues et des biologistes, mais aussi de l’Etat et des collectivités territoriales : création de Parcs (Nationaux, Régionaux) de Réserves naturelles, achat de terres par le Conservatoire du Littoral.

Sur ces terrains, la disparition des usages produit en quelques décennies, un changement paysager très net en raison du développement des strates arborées et des ligneux qui ferment les milieux et tendent à éliminer des espèces emblématiques des milieux ouverts ou semi ouverts.

Du point de vue de la biodiversité, l’herbivorie

On doit ajouter à l’élevage des taureaux, celui des chevaux qui en est le complément. Il joue un rôle positif important en empêchant la fermeture défavorable à de nombreuses espèces floristiques, sa présence entraîne celle d’un cortège d’insectes, ressource alimentaires d’oiseaux et mammifères,limite le développement des espèces invasives.

Le pâturage extensif,
un moyen écologique d’entretenir la diversité biologique

Le pâturage extensif est donné aujourd’hui comme un moyen écologique d’entretenir la diversité biologique de milieux d’où il est exclu pour des raisons économiques ou de conservation de la nature, d’intervenir mécaniquement. Il contribue ainsi à la valorisation économique de la biodiversité, partout où est évité le sur-pâturage.

On comprend par là le rôle important que peut avoir l’existence de ces élevages en termes de développement durable.

L’EXEMPLE CAMARGUAIS

Attardons nous sur le delta du Rhône, où la majorité des taureaux de combat français sont élevés (85 % des élevages français). Ils sont représentatifs du rôle écologique de l’élevage extensif et peuvent être étendus à d’autres territoires selon leurs spécificités écologiques propres.

Plus de la moitié de la superficie du territoire
Camarguais est constituée d’espaces naturels

Avec la protection de la nature, le pâturage extensif est un des modes de gestion de ces espaces. Il permet l’entretien des sansouires (9 000ha), des marais (10 000 ha), des roselières et jonchaies (6 000 ha), des pelouses (2 000 ha), ainsi que des boisements (3 000 ha), là où il est implanté (ces chiffres sont tirés de l’analyse de l’occupation du sol réalisée par le Parc Naturel Régional de Camargue ; PNRC, 2013).

Certaines espèces végétales patrimoniales se développent exclusivement dans des milieux ouverts et sont donc directement dépendantes de l’action sur les habitats des taureaux et des chevaux (ex : Orchidées, Cresse de Crête, Nivéole d’été, etc.). Une espèce, l’Héliotrope couché ne pousse même que dans les marais temporaires fortement piétinés par le bétail. On peut aussi citer certaines espèces d’oiseaux insectivores (tel que le Héron garde-boeufs) qui s’alimentent préférentiellement dans les manades. D’autres espèces (Echasse blanche, Glaréole à collier, etc.) profitent de l’ouverture du milieu mais aussi de l’impact du piétinement du bétail sur le sol (cuvettes naturelles) pour installer leurs nids. Certaines espèces rares de chauves-souris s’alimentent quasi exclusivement d’insectes présents dans les crottes des bovins.

La fauche des prairies humides, liée aux activités d’élevage, est également indispensable pour la conservation de certaines espèces végétales. On voit ici qu’il est important de parler des parcours de l’élevage, ou plutôt ici, en Camargue, des espaces occupés par l’élevage, tels que marais, sansouires (steppes salées à salicornes), prairies naturelles ou encore parcelles agricoles après la récolte, selon les saisons. Il faut ainsi souligner l’intérêt de l’élevage pour la valorisation des terres basses et humides autrefois non rentables.

L’élevage extensif joue un rôle environnemental majeur

Ce mode de pâturage, pratiqué en semi-liberté de manière très extensive (moins d’un animal à l’hectare) sur de vastes étendues et sans équipements (ni écuries, ni étables), contribue directement au maintien des habitats des autres espèces animales et végétales. On considère en effet, qu’une des raisons majeures à l’érosion de la biodiversité dans le monde est due à la réduction des habitats.

Ainsi, dans le Parc Naturel Régional de Camargue et sur l’ensemble du delta du Rhône, l’élevage extensif des deux races de taureaux (raço di biou et combat), de chevaux et dans une moindre mesure de moutons, contribue au maintien d’habitats naturels. Il joue un rôle environnemental majeur parce qu’il influence l’évolution de la dynamique végétale des milieux naturels (sansouires, prés salés, marais et pelouses) : chevaux et taureaux limitent l’accroissement de certaines espèces végétales, et utilisent de grands ensembles de végétation composés d’une mosaïque d’habitats juxtaposés et interconnectés.

L’élevage, un pilier dans le maintien des traditions et d’un patrimoine unique en France.

D’un point de vue plus large, les élevages, fortement ancrées dans la vie camarguaise, en constituent l’un des piliers : par l’organisation de nombreuses manifestations taurines et festives rapprochant notamment entre eux les différents secteurs de productions du terroir ; par la reconnaissance et le maintien des traditions et d’un patrimoine unique en France.

Au poids économique croissant de cet élevage qui se développe depuis une vingtaine d’années, s’ajoute d’autres aspects économiques : la commercialisation de la viande de taureaux (celle des animaux élevés dans le delta à obtenu un label AOC en 1996, cf. plus loin) et les spectacles dans les nombreuses villes et villages du sud de le France.